Vivien Roubaud - Univers encapsulés
Le Creux de l'enfer, Centre d'art contemporain d'intérêt national

Pour son exposition personnelle au Creux de l’enfer, Vivien Roubaud déploie au rez-de-chaussée une installation tentaculaire propre aux dimensions de l’espace, Désiphonnage, faite de matériaux récupérés. Ce complexe assemblage d’éviers, de baignoires et de tuyaux, forme un réseau inédit de circulation d’eau prélevée dans la rivière de la Durolle, longeant le centre d’art. Ainsi, Vivien Roubaud nous fait découvrir des “univers encapsulés” utilisant la force motrice de l’eau ou la force centrifuge. En effet, à l’étage, entièrement bercé et animé par un jeu d’ombre et de lumière en mouvement, brillent trois lustres en rotation autour de leur axe, dans des sphères gonflables connectées entre elles: Gonflables, contrepoids, transmission scooter électrique, lustres à pampilles, collecteur tournant, chaine de moto, vingt-quatre volts. Plus loin, sur un mur préservé de cette agitation constante, des stalactites calcaires reliées à un micro système de goutte-à-goutte poursuivent leur croissance, presque invisible. Soit autant de phénomènes et d’instants que l’artiste aura reconditionnés et isolés, proposant un regard distancé sur leur statut habituel.
Dans son mode opératoire, Vivien Roubaud s’intéresse aux objets et aux principes de fonctionnement des machines issues de notre quotidien, ainsi qu’aux mélanges d’époque et de style (il utilise des lustres à pampilles anciens et leur insuffle des mouvements motorisés). Quand il travaille avec des matières minérales, il élargit le champ des possibles jusqu’à l’appropriation délicate de ces sédiments. Son projet composé de stalactites prélevées dans des bâtiments désaffectés, fonctionne comme un sablier mesurant le passage du temps à une échelle imperceptible pour l’être humain. Ces “objets” servent de matière première à ses créations et se trouvent démantelés pièce par pièce, afin d’en récupérer certains principes et de les hybrider sans retenue.
Vivien Roubaud esquisse nombre de notes et de croquis en vue de bâtir une machine expérimentale, à partir d’éléments glanés et recombinés. Dans son titre même, Désiphonnage souligne avec humour la folie des projets menés par l’artiste — en effet, faut-il bien être “siphonné” pour se lancer dans un tel ouvrage! Vivien Roubaud déjoue ainsi les programmes qui animent machines et objets industriels, afin de créer des prototypes d’un autre genre. En ce sens, les oeuvres de l’artiste font souvent perdre leur usage premier aux objets qu’elles recyclent pour en extraire une substance capable de produire des instants poétiques.
François Salmeron
Centre d’art contemporain
Le Creux de l’enfer
Vallée des usines
85, avenue Joseph Claussat
63300 Thiers